30 juin 2010

Dracula The Undead

Roman de Dacre Stoker et Ian Holt

En 1888, un groupe de six intrépides a réussi à détruire Dracula aux portes de son château de Transylvanie. Vingt-cinq ans plus tard, ils se sont dispersés mais le souvenir de cette périlleuse aventure où l'un d'eux à laissé sa vie les poursuit. Combat quasi mystique contre les forces du mal, vengeance d'amoureux endeuillés ou inextinguible jalousie : les raisons mêlées de leur acte continuent de perturber leur existence et la disparition du prince des ténèbres n'a pas apaisé leurs tourments.
Une mort inexpliquée devant un théâtre parisien et un deuxième assassinat d'une effroyable cruauté au coeur de Londres vont réveiller la peur. Du Quartier Latin à Piccadilly, l'ombre de Dracula semble à nouveau planer... Les héros d'autrefois devront faire face à un ennemi insaisissable aux attaques sournoises et d'une violence inouïe, mais aussi à leurs propres démons.


Cette suite "officielle" tant attendue du superbe roman de Bram Stoker se déroule 25 ans après les évènements relatés par ce dernier et qui selon les auteurs ont eu lieu en 1888 (on tentera de ne pas rire). Les intentions de Dacre Stoker et de Ian Holt sont louables et on ne peut nier la hardiesse du geste, puisque le roman à pour but la réappropriation du personnage de Dracula par le nom qui l'a fait naître : Stoker. Avançant comme ligne directrice une fidélité inédite à l'oeuvre de Bram Stoker, les créateurs de cette séquel se sont pourtant, j'en ai peur, perdus dans la masse des informations récoltées sur le personnage, que ce soit au niveau historique, littéraire ou cinématographique.
La quatrième de couverture parle des "héros d'autrefois", et cet "autrefois" est à souligner trois fois, puisqu'il serai plus judicieux de parler de ce qu'il reste de ces héros, tombés en déchéance. Après une lettre presque inopportune de Mina adressée à son fils qui résume tant bien que mal en quelques pages l'aventures que Stoker a mis 580 pages à relater en guise d'ouverture, on retrouve les noms connus du roman, Seward, Harker etc, qui 25 ans après avoir affronté Dracula, sont devenus, pour le premier, morphinomane au dernier degré et obsédé par la traque du mal qui rode dans l'ombre, pour le second, un alcoolique antipathique et con, qui a toujours en travers de la gorge l'idylle entre sa fiancée et le monstre. Une idée intéressante que de désolidariser les protagonistes qui en sont réduits à l'état d'épaves, ce qui est le cas pour toute la bande, sauf pour Mina, qui, il faut bien l'avouer ne fait que rêver à Dracula, entre désir et culpabilité.
Parmi les nouvelles têtes, on trouve bien évidemment le jeune Quincey Harker, évoqué brièvement dans la note finale du roman d'origine, qui a bien grandi et qui a pour ambition dans la vie outre de contredire son père à tort et à travers, de devenir acteur... Autant le dire tout de suite, Quincey a l'épaisseur psychologique d'une feuille cançon et il est pourtant tout l'enjeu du roman, lui qui représente la jeune génération. Grande idée qui est celle de situer les premiers évènements à 1888 n'est-ce pas ? Cela permet de lier Dracula à Jack l'éventreur et de faire intervenir un personnage présent dans les notes originales de Stoker mais évincé du roman : l'inspecteur Cotford, qui a, 25 ans auparavant assisté Abberline dans son enquête au coeur des ténèbres de Whitechapel et ne s'est toujours pas remis de l'échec, un gros baton dans les roues de Mina et compagnie... Oh et puis, n'oublions pas que la pire menace qui plane sur nos protagonistes n'est pas Dracula, mais en fait la comtesse Elizabeth Bathory, vampire et psychotique de son état qui joue avec tout ce beau monde comme avec un gigantesque échiquier.
Je pense avoir posé les bases essentielles et avoir mis en exergue quelques unes des plus importantes des grosses ficelles tirées par le duo qui promettait pourtant des merveilles. Tout d'abord notons que le roman s'émancipe du style épistolaire de son modèle, et s'émancipe d'ailleurs de toute notion de style : en français comme dans le texte, cet Immortel est écrit avec une platitude effarante ! On pourra aussi remarquer que les premiers chapitres ne sont aucunement crédibles, bourrés de références grossières éparpillées ça et là comme si de rien était... hélas, ces furoncles référenciels n'ornent pas seulement les premiers chapitres, mais se font heureusement plus discrets par la suite, mais pas pour autant plus fins, on croisera ainsi un sergent Lee, un agent Price ou un Dr Langella, et même le Titanic... quand je vous parlais de la masse d'information dans laquelle il est si facile de se perdre à force d'excès de zèle.
Dracula The Undead a au moins le mérite de se lire facilement malgré l'épaisseur du volume, et gagne en intérêt avec l'apparition dans l'intrigue de Bram Stoker himself qui (nous sommes en 1912 rappelons-le) tente de mettre en scène son Dracula au Lyceum de Londres, épaulé par Hamilton Dean. Encore une fois, c'est intéressant, mais ça n'est jamais très crédible, Stoker doit jongler avec son statut d'auteur du roman Dracula (un des intrépides lui a tout raconté, mais lequel ? Une sous-intrigue assomante et dont l'issue est complêtement bancale) et d'acteur des évènements. Le mérite de Ian Holt et Dacre Stoker est au moins d'avoir su rendre tout à fait clair ce méli-mélo narratif, qui n'en demeure pas moins insatisfaisant. Tout espoir que donne Dracula the Undead en terme de qualité, il l'anéanti presque aussitôt avec de navrantes révélations, des retournements abracadabrants de situations, et tout est perdu lorsque Dracula fait véritablement son apparition. Certes, le noble guerriers est plutôt bien dépeint, mais jamais au grand jamais, on ira croire qu'il a changé Lucy en vampire pour la sauver des erreurs de transfusion de van helsing qui la conduiraient à une mort certaine. Tout comme on ne croira jamais à cette image d'un Van Helsing, l'instant d'avant sénil, l'instant d'après, le regard rougeoyant, clamant "rejoignez-nous dans les ténèbres !". Je dirai à mon grand désespoir que le mieux est encore d'en rire.
Je reste, comme chacun le sait un grand amoureux de Dracula et j'apprécie le travail fourni par Ian Holt sur le sujet, mais je ne peux cacher ma déception qui est à la hauteur de l'admiration que j'ai pour le personnage créé par Stoker et la fièvre qu'il a engendré dans la littérature comme au cinéma. Au mieux, ce Dracula The Undead, dans lequel le personnage de Dracula n'est qu'un joli concept, pourra être qualifié de sympathique divertissement, un bien misérable qualificatif pour une suite qui avait pour but de témoigner au Dracula de Bram Stoker tout le respect qui lui était dû et qui a mis 110 a venir !

2 commentaires:

Clelie a dit…

Gabriel,

Même si je n'ai pas (encore) lu Dracula The Undead commis par Dacre Stocker et son complice, je suis admirative et je pleure d'un rire nerveux devant ta flamboyante critique !

Bravo, on en redemande !

Clelie

Vladkergan a dit…

Au final un roman de gare parmi tant d'autres, et qui ne vaut pas l'étiquette de suite officielle dont il se vante. On perd beaucoup de chose, que ce soit au niveau du style et de l'ambiance.

Ma chronique de Dracula l'immortel de Ian Holt et Dacre Stoker