18 oct. 2009

Anno Dracula


Roman de Kim Newman, publié en 1992.
Avon Books (fiction) n°72345.
403 pages.
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1992, grande année pour un certain vampire, c'est en effet l'année de la sortie du fameux Bram Stoker's Dracula de F.F. Coppola. Les années 90 dans leur globalité ont été une décénie intéressante pour le vampire puisque, plus que les films, les romans autour du personnages ont été somme toute prolifiques. On peut citer en vrac la saga de Fred Saberhagen, débutée avec Les Confessions de Dracula (suivront Les dossiers Holmes/Dracula et une floppée d'autres), l'excellente sequelle de Freda Warrington, Le Retour de Dracula, ou encore le pastiche savoureux de Tony Marks, L'Autre Dracula. Ces romans sont aujourd'hui malheureusement de grands oubliés de nos librairies (même si la sortie récente de Dracula The Un-Dead, par Dacre Stoker va peut-être changer la donne) et Anno Dracula ne fait pas exception !
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Nous sommes en 1888, et l'Angleterre est sous le joug d'un nouveau prince consort, en effet la Reine Victoria est l'épouse du Prince Vlad Tepes, connu dans toute l'Europe sous le nom de Comte Dracula ! L'ère des vampires est arrivée, une ère de décadence et d'oppression dont le symbole radicale est la tête d'Abraham Van Helsing...au bout d'une pique, pourrissant devant Buckingham Palace. Mais tandis que Londres sombre peu à peu dans les ténèbres, un minutieux tueur en série s'applique à dépeupler les bouges de Whitechapel en éventrant les prostituées...l'affaire semble assez banale jusqu'à ce qu'un message à la craie apparaisse sur l'un des murs d'une ruelle "Vampires will not be blamed for nothing" dès lors, l'affaire recquiert l'intervention des services secrets, menés par un Mycroft Holmes désabusé.
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Voila pour la petite histoire, un pitch intéressant pour un cross over sinon maintes fois vu, maintes fois fantasmé. Mais en dehors des grandes lignes qui revisitent la chûte de Dracula et les évênement de 1888, qu'offre réellement Anno Dracula ?
Kim Newman, dandy des temps modernes ancien artiste de cabaret et spécialiste des vampires sous toutes leur formes réussit à nous emmener dans un londres ténébreux plus vrai que nature et à nous faire cottoyer les protagonistes les plus connus du monde littéraire de l'époque, auteurs comme personnages, c'est ainsi qu'on croisera le temps d'une reception Florence Stoker, veuve de l'opposant Bram Stoker, riant flûte de champagne à la main, d'un trait d'humour piquant de Lord Godalming, ce cher Arthur que nous avions quitté chaud et que nous retrouvons froid comme la mort mais toujours aussi vif, pour une petite autopsie, ça sera avec le taciturne et frèle Dr Jekyll qui partage un antique laboratoire avec le Dr Moreau, on retrouvera dans les bureaux de Scotland Yard l'inspecteur Abberline désemparé, Sir Charles Warren qui risque sa tête et qui passe ses colères sur un Lestrade "jeune-vampirisé", un Dr Seward Nevrosé, et le temps d'une entrevue à Buckingham palace, un Josef Merrick effacé, Une veuve Harker qui s'est plutôt bien remise, Un prince Consort féroce et une reine qu'on sort, littéralement.
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Inutile de vous préciser que les choses vues sous cet angle rendent la lecture savoureuse sans que pour autant le tout paraisse trop léger. Kim Newman ne propose pas une telle galerie de personnages pour rien et l'utilise au mieux, même si certaines figures sont par trop sous-employées. En plus de ses figures connues, il est agréable de découvrir de nouvelles têtes avec Charles Beauregard, employé par la Diogènes Society et surtout, le personnages le plus remarquable du roman, Geneviève Dieudonné, une "ancienne" plutôt avant-gardiste, élégante et petillante, si vivante qu'elle parait traverser les pages !
Avec le personnage de Dracula, Newman réussit un petit tour de force, car la figure malfaisante est presque absente de l'intégralité du livre, mais elle est sans cesse suggérée et l'oppression qui règne dans Londres est la digne conséquence des menaces apocalyptiques proférées par le comte dans le roman de Stoker.
Il serait dommage de divulguer un quelconque pan de l'intrigue tant toutes les surprises que recèle Anno Dracula sont délicieuses et souvent d'une extraordinaire complexité, depuis la révélation concernant l'identité de coupable jusqu'à une foule de références qui feront la joie des amateurs de littérature et de cinéma vampirique !
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Anno Dracula est un véritable roman gothique, sombre et remarquablement écrit, d'autant plus remarquable qu'il s'affranchit du style épistolaire du Dracula de Stoker, duquel tant d'auteurs s'étant essayés à l'exercice n'ont pas su se détacher : Un magnifique hommage et un premier tome brillant pour une trilogie trop peu connue.

2 commentaires:

Vladkergan a dit…

Très certainement l'une des uchronies les plus captivantes qu'il m'ait été donné de lire. Kim Newman réalise ici un hommage incroyablement riche à la littérature victorienne et à ses personnages fétiches. Il s'attaque au mythe de Dracula avec un sens de la narration, du rebondissement et de l'humour noir absolument jouissif. Les deux suites sont un cran en dessous de ce premier volume absolument démentiel. Ici une autre chronique de Anno Dracula, par Kim Newman

Anonyme a dit…

J'enrage, dire que je l'ai vu pour 3 euros dans une boutique d'occaz il y a quelques temps et que je l'ai pas acheté ... maintenant c'est 20 euro minium pour le trouver mais il a l'air tellement bien !

(raison-et-sentiments.cowblog.fr)