27 sept. 2009

The Pit and the Pendulum

Réalisé par Stuart Gordon en 1991
Avec Lance Henriksen, Jeffrey Combs, Oliver Reed, Rona De Ricci, Jonathan Fuller, Frances Bay...
Produit par Albert Band et Charles Band. Musique composée par Richard Band.
Librement adapté de la nouvelle The Pit and the Pendulum d'Edgar Allan Poe.

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Espagne, fin du XVème siècle, Le grand inquisiteur Torquemada orchestre exécutions et tortures au nom de Dieu. Lorsque la jeune Maria est arrêtée et enfermée pour sorcellerie, il juge que le soudain amour qu'il lui porte ne peut-être que l'oeuvre du diable mais refuse pourtant qu'elle soit torturée, il lui avoue son amour et lui coupe alors la langue pour que le secret soit gardé. Mais c'est sans compter sur Antonio, le mari de Maria qui bravera le pendule, pièce maitresse et tranchante de la collection de Torquemada pour récupérer sa bien aimée.


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Drôle de cas que celui de la compagnie Full Moon, maison de production "familliale" crée par Albert Band et son digne fils Charles connue pour ses sortie direct-to-video de série B parfois douteuse. De la même manière que l'écurie Corman ou Harry Allan Towers, l'équipe Full Moon trouve son inspiration le plus souvent dans les grand classiques, comme par exemple pour Meridian, de Charles Band visiblement tiré de la Belle et les Bête ou sa Maison du Dr Moreau tirée du roman de H.G Welles, la saga Subspecies, de Ted Nicolaou nourrie des récits de vampires modernes, ou Castle Freak de Stuart Gordon, inspiré (comme son Dagon), de l'univers de Lovecraft.


Stuart Gordon est un artisan sinon précieux du cinéma (il en est un certainemant pour le cinéma bis) un réalisateur très curieux et loin d'être inintéressant. Il a derrière lui au moins 3 succès qui sont Dagon (2001), Dolls (1987) et Reanimator (1985), dans lesquels n'apparait malheureusement pas ce The Pit and the Pendulum (1991) trop méconnu.

Le film commence bien, même très bien, avec une introduction presque baroque qui nous montre le procès pour hérésie du comte Albino de Molina ou plutôt de son cadavre, auparavant enterré selon les saints sacrements puis déterré après les conclusion du grand inquisiteur. La poésie de la scène, résidant aussi bien dans les costumes et le splendide thème musical de Richard Band que dans l'action elle-même (les cendres du comte qui remplissent un immense sablier après une flagellation qui réduit le cadavre en poussière) laisse augurer le meilleur, tout comme le magnifique générique se déroulant sur les gravures de Pieter Bruegel "The Triumph of Death".



Adapter Poe n'est pas une mince affaire et ce film n'a rien à voir avec la version de Roger Corman, c'est bien l'inquisiton espagnole qui est mise en avant par Gordon, qui en profite pour dresser le portrait d'un inquisiteur cruel (Lance Henriksen) qui n'est pas sans rappeler Frolo dans Notre Dame de paris de Victor Hugo : Il a à ses côtés un jeune idiot, diforme, qu'il a "sauvé" , qui porte les stigmates du christ et qui sera son meurtier, il ne peut se cacher son désir pour la jeune Maria qu'il considère par conséquent comme l'incarnation du diable...Une transposition intéressante qui reste néanmoins un peu trop évidente.

Le casting est comme souvent chez Full Moon composé de têtes connues et appréciées des habitués, notamment Lance Henriksen (Aliens le retour, Alien 3), terrifiant dans sa cruauté et sa folie, mais aussi Jeffrey Combs (Re-animator, Castle Freak, Dagon...), en greffier cynique ou Oliver Reed en cardinal, homme de principe mais malheureusement un peu trop porté sur la bouteille, personnage ironique, plus symbolique qu'effectif.
Rona De Ricci incarne quant à elle une Maria qui plutôt qu'Esmeralda, nous évoque Justine, des Infortunes de la vertu du Marquis de Sade, et ce plus que jamais dans une scène ou elle est convaincut que l'homme de Dieu qu'est Torquemada est sincère lorsqu'il dit qu'il les laissera vivre, elle et son mari. Elle s'affranchira de cette candeur par la suite, et le changement sera explicité lors d'une scène de "resurection" magnifique.
Gordon traite aussi d'un thème cher à Poe dans son film, le temps d'une séquence : le fait d'être enterré vivant, bien sûr, aucune adaptation de Poe n'est digne de ce nom si elle n'aborde au moins une fois le sujet.
D'un point de vue technique, le film ne souffre pas trop de son budget réduit, les décors, quoique restreints ne lassent pas et les effets sanglants, avec lesquels l'équipe ne lésinent pas sont globalement réussis et n'entrave jamais la narration : de la complaisance dans un film sur l'inquisition, ce serait un comble !



Gordon s'il ne signe donc pas ici un film historique ou une véritable adaptation de Poe, ni même les deux à la fois, dresse un portrait quelque peu extravagant de l'inquisition espagnole, violent et visuellement agréable, même beau pour un rejeton de la Full Moon dont on sait que la qualité des productions est très inégale. Une sorte de conte macabre qui pourrait, si la photographie avait fait l'objet de plus de soin, se placer aux côtés du Phantom of the Opera de Little dans la ronde interminable des adaptations des grands classiques de la littératures gothique/fantastique de la fin des années 80, au cour de laquelle les noms de Harry Allan Towers, Roger Corman, Stuart Gordon, Charles Band etc. seront amenés à réaparaître à de nombreuses reprises.

1 sept. 2009

Frankenstein Unbound



Réalisé par Roger Corman en 1990.
Avec John Hurt, Raul Julia, Bridget Fonda...
D'après le roman de Mary Shelley et librement inspiré du roman de Brian Aldiss.

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Le Dr Joe Buchanan pense avoir trouvé le moyen de créer une arme qui contrairement à la bombe atomique ne pourrait jamais mette le monde en péril. Mais sa découverte entraine un boulversement spatio-temporel qui va le conduire au début du 19ème siècle à Genève. Là il fait la connaissance de la jeune Mary Godwin et des poètes Shelley et Byron, mais assiste aussi aux faits qui ont inspiré le roman Frankenstein : il se retrouve en effet face au baron lui même et à sa créature...
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Le mythe de Frankenstein s'est trouvé surexploité dans les années 70, divers téléfilms adaptent en effet plus ou moins fidèlement le roman de Mary Shelley, comme celui de Dan Curtis, Terror of Frankenstein avec Leon Vitali, Frankenstein; The True Story de Jack Smight (dont j'ai parlé précédemment) et le cinéma d'exploitation s'en donne à coeur joie avec des variantes jouissives tel le Chair pour Frankenstein de Paul Morrissey, ou le succulent Lady Frankenstein de Mel Welles, sans oublier l'irrésistible Frankenstein Junior de Mel Brooks...tant d'avatars qu'on en vient à perdre l'essence de l'oeuvre et à oublier sa genèse et sa raison d'être. Si de 85 à 88 sortirons sur les écrans divers films narrant la genèse du roman, avec la fameuse nuit des Shelley à la villa Deodatti : Gothic de ken Russell, Rowing with the wind, avec Hugh Grant ou le très rare Haunted Summer, auxquels on peut ajouter par curiosité The Bride, avec Sting et Jennifer Beals, difficile de mettre en relation cette nuit de débauche hallucinatoire avec le Prométhée Moderne de Mary Shelley.
C'est en 1888 que Corman se voit confié un budget conséquent par la Twentieth Century Fox pour enfin faire ce lien. Voila près de 17 ans que Corman n'a oeuvré qu'en tant que producteur, et si on se souvient de la prolifique décénie 1960 (qui vit entre autre naitre le cycle Poe), Roger Corman, versatile et dillétante professionnel n'entre plus dans les bonnes grâces dans grands studios ni dans celles du spectateur. Le projet de Frankenstein Unbound aboutie finalement en 1990 à un film d'une durée totale d'une heure et vingt minutes certes nanti d'un casting de choix, d'une belle photographie et d'un scénario intéressant mais qui recevra un accueil mitigé duquel le temps n'a pas encore eu raison : Frankenstein Unbound reste un film hautement sous estimé.
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De la même manière que le Phantom of The Opera de Dwight H. Little (1989), Frankenstein Unbound revient aux fondements de l'oeuvre via un twist de même nature : Le Dr Buchanan, version moderne de Frankenstein va apprendre à ses dépend que l'histoire se répète et ce de façon irréversible. Corman réussit à rendre son histoire tout à fait crédible, ou du moins parvient à la rendre moins invraissemblable qu'il n'y parait : En effet, Buchanan en plus de se retrouver à cheval sur deux époques, va devoir jongler avec deux univers, d'un côté celui de Mary Shelley et de l'autre, celui du Baron Frankenstein, qui n'est pas encore devenu le personnage littéraire que l'on connait aujourd'hui. Le tout aurait pu devenir très compliqué, mais au final le scénario s'avère béton et jamais le spectateur ne se retrouve le cul entre quatre chaise comme le pauvre Buchanan mais suit agréablement l'intrigue.
Sur sa forme, le film ne pèche aucunement, les effets spéciaux certes un peu dépassés servent très bien le film ainsi que le superbe maquillage de Nick Dudman (qui oeuvrera plus tard sur la saga Harry Potter), on pourra aussi saluer les magnifiques costumes de Franca Zucchelli. La prestation des acteurs ne souffre aucune critique, le trio de tête John Hurt (Buchanan), Raul Julia (Frankenstein, que l'on retrouvera dans le rôle de Gomez dans The Addams Family) et Bridget Fonda (Mary Shelley) est fantastique. Nick Brimble dans le rôle du monstre offre lui aussi une belle composition, ainsi que Jason Patrick dans le court rôle de Lord Byron.
Mais vous l'aurez compris, ce qui est pour moi le point fort de Frankenstein Unbound, c'est son scénario, qui capte à merveille le message du roman de Mary Shelley dans un final apocalyptique où Buchanan se rend compte qu'il n'est lui-même plus qu'une sorte de Frankenstein et que le progrès pour le progrès engendrera toujours les mêmes effets.
Certes on pourra toujours préférer un adaptation fidèle et plus "grand publique" comme la splendide version de Kenneth Brannagh, dont je ne nie nullement les qualités, mais il serait dommage de passer à côté de la si belle reflexion que nous offre Frankenstein Unbound qui du reste et sur tous les plans n'a que peu à envier aux films de Brannagh et consort.